Loi El Khomri: une mobilisation en demi-teinte
Entre 400.000 et 500.000 personnes ont manifesté mercredi partout en France contre la loi El Khomri, dont 100.000 à Paris, selon les organisateurs. La Préfecture de police annonce un chiffre plus modeste, comptant entre 27.000 et 29.000 manifestants dans les rues de la capitale. Premiers à démarrer, dans la matinée, plusieurs centaines de lycéens s'étaient donné rendez-vous place de la Nation à Paris. Avec, dans la bouche, l'inévitable slogan: «El Khomri t'es foutue, la jeunesse est dans la rue.»
Venus d'établissements de l'Est parisien et de banlieue, ils brandissent quelques fumigènes et narguent les CRS mais l'ambiance reste bon enfant. Comme devant le siège du Medef, près de l'École militaire. Mais ce n'est pas celle des grands jours.
Licenciement économique, forfait-jour, santé au travail: les représentants d'une dizaine de syndicats planchent jeudi sur les modifications à réclamer au projet de loi de réforme du code du travail, critiqué de toutes parts et dont la présentation en Conseil des ministres a été reportée au 24 mars par le premier ministre Manuel Valls, pour permettre de le «retravailler». Deux intersyndicales successives sont prévues. La première à partir de 9h30 au siège de l'Unsa à Bagnolet, près de Paris. Seront présents CGT, FO, CFDT, CFTC, Unsa, Solidaires, CFE-CGC, FSU, ainsi que l'Unef (étudiants) et l'UNL (lycéens). La seconde sera l'occasion de préciser les contours d'une mobilisation, sans doute le 31 mars. L'Unsa et la CFDT seront absentes, la CFTC prendra sa décision après la première réunion. «Nous allons travailler sur les amendements à apporter et proposer un texte commun de revendications», explique Florence Dodin, représentante de l'Unsa.
Ce jeudi, la ministre du Travail Myriam El Khomri poursuit le cycle de rencontre entamé la semaine dernière pour discuter d'amendements possibles. La ministre reçoit la CFTC, la CGT, la CGPME et le Medef. Et la semaine prochaine, ce sera au tour de Manuel Valls de recevoir les partenaires sociaux séparément, avant de les voir tous ensemble le 14 mars. Après le Conseil des ministres du 24 mars, le Parlement prendra le relais fin avril pour une adoption définitive d'ici la pause estivale. Invitée ce matin sur France 2, la ministre du Travail, sans jamais les désigner, a appelé les partenaires sociaux à «avancer». «Le temps de la concertation, du débat, du dialogue sont nécessaires. Mais nous souhaitons faire avancer notre pays. L'immobilisme, c'est cela qui menace notre modèle social», a déclaré Myriam El Khomri ce jeudi matin sur France 2.
De leur côté, les syndicats espère peser sur la nouvelle version du projet Les organisations syndicales souhaitent aussi retirer les articles «qui accroissent le pouvoir unilatéral des employeurs». Parmi les nouvelles dispositions pointées: possibilités pour l'employeur de recourir sans accord d'entreprise au forfait-jour, un régime dérogatoire aux 35 heures, et faire travailler des apprentis 40 heures par semaine avec moins de contraintes administratives. Autre chiffon rouge: le licenciement économique. La version initiale du texte précise les motifs de licenciements (baisse du chiffre d'affaires, commandes, pertes d'exploitation). Les syndicats voient dans cette mesure voulue par Bercy un risque de licenciement abusif. La CFDT, qui a l'oreille du gouvernement, refuse que lorsqu'il s'agit d'un groupe, la filiale française soit la seule prise en compte. La centrale de Laurent Berger redoute de voir les grands groupes pratiquer le dumping social en Europe.